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Viktor Orban, l’Européen qui mise sur Donald Trump

Constante épine dans le flanc de l’Union européenne (UE), Viktor Orban, le premier ministre hongrois qui a théorisé la « démocratie illibérale » et s’est fait le champion de son application pratique, a, depuis le 1er juillet et pour six mois, l’occasion rare de tenter de mettre en œuvre sa vision restrictive du projet européen, puisque c’est à son pays qu’échoit en ce moment la présidence tournante de l’UE.
Au pouvoir sans discontinuer depuis 2010, Viktor Orban est aujourd’hui le dirigeant le plus ancien parmi les Vingt-Sept autour de la table du Conseil européen. Il est devenu aussi le spécialiste de l’obstruction, sabotant, grâce à la règle de l’unanimité, une multitude d’initiatives, notamment les condamnations diplomatiques de violations du droit international par des régimes autoritaires.
Plus grave, en contact régulier avec Moscou, il bloque depuis plus d’un an l’allocation de 6,6 milliards d’euros destinée à rembourser aux Etats membres l’aide militaire qu’ils fournissent à l’Ukraine, une obstruction qui « [leur] pourrit la vie », confiait récemment un responsable de la diplomatie européenne. Il a aussi bloqué les négociations, pendant des semaines, sur le versement d’une aide financière de 50 milliards d’euros à l’Ukraine jusqu’à 2027, avant que les Vingt-Sept parviennent, le 1er février, à un accord permettant ce versement.
Longtemps, Viktor Orban a pu se prévaloir du soutien du puissant groupe parlementaire du PPE, le Parti populaire européen, qui rassemble les formations de centre droit, notamment la CDU allemande, et qui avait curieusement accueilli en son sein le parti de M. Orban, le Fidesz. L’obstination de la chancelière Angela Merkel à garder le parti hongrois sous l’aile du PPE, dans l’illusion qu’il y serait moins nocif, a été totalement contre-productive ; le dirigeant hongrois a au contraire interprété cette protection comme un blanc-seing pour ses écarts.
Le vent, cependant, a tourné. Sous la pression, en mars 2021, le Fidesz a enfin quitté le PPE ; M. Orban a aujourd’hui son propre groupe au Parlement européen, les Patriotes, troisième groupe par le nombre avec 83 députés, dont ceux du Rassemblement national (RN) – c’est d’ailleurs Jordan Bardella, le président du RN, qui a été placé à la tête des Patriotes. Et c’est au PPE que siège à présent le principal adversaire de Viktor Orban sur la scène hongroise, Peter Magyar, transfuge du Fidesz, dont la popularité commence à sérieusement gêner le premier ministre.
Les choses sont plus claires. Elles l’ont été d’autant plus, mercredi 9 octobre, que la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’est livrée à une attaque d’une virulence sans précédent contre Viktor Orban devant le Parlement européen à Strasbourg, où le premier ministre était venu présenter les priorités de la présidence hongroise. Népotisme, détournement de fonds européens, complaisance de Budapest à l’égard des régimes russe et chinois qui trouvent ainsi une porte d’entrée en Hongrie : en énumérant ces accusations sans fard, Mme von der Leyen a visiblement fait mouche, si l’on en juge par la riposte de M. Orban qui a accusé vendredi l’UE de chercher à « renverser son gouvernement plutôt que de s’attacher à résoudre les problèmes européens ».
Ami de Moscou, Viktor Orban mise sur la victoire de Donald Trump, le 5 novembre, aux Etats-Unis. Il s’est gagné les grâces de l’ex-président américain, qui le reçoit et dont l’entourage considère l’orbanisme comme une inspiration. C’est un avertissement sérieux, que les Européens auraient tort d’ignorer.
Le Monde

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